Le blog d’Arthur Hunt

Ainsi, si le temps n’est pas remis en question, ce qui interroge, c’est l’organisation-même du travail. En effet, selon une étude conduite pour l’entreprise américaine Otter à l’été 2022, les salariés non-managers passeraient 18 heures par semaine en réunion. Une durée qui s’élève à 22 heures pour les salariés managers. Par ailleurs, une étude HelloWork conduite en France en 2017, nous apprend que près d’une réunion sur deux est jugée inutile par ses participants. Or, depuis la crise sanitaire, 60% des travailleurs ont constaté une augmentation du nombre de réunions dans leur quotidien. Cette situation conduit un grand nombre de salariés à un même constat : le temps passé en réunion ralentit l’avancée dans les tâches à traiter et pousse de facto à augmenter leur temps de travail pour traiter les dossiers de fond. Une situation qui conduit à une fatigue générale et à un sentiment de frustration.
Par ailleurs, pour Christophe Nguyen, psychologue du travail, le nombre de réunions et leur durée qui tend à s’allonger peut être l’expression d’un manque de confiance et d’autonomie accordées aux collaborateurs par les entreprises. Ainsi, en invitant le plus de personnes possibles, les organisateurs chercheraient à s’éviter d’être tenus pour responsables d’une décision.
L’hybridation de nos modes de travail, accélérée depuis la crise COVID, a de nombreux côtés positifs. Le télétravail est notamment largement plébiscité par les cadres (selon une étude de l’APEC, en septembre 2021, les 3/4 des cadres souhaitaient pouvoir travailler à distance au moins un jour par semaine). Toutefois, mêlée à des injonctions de productivité, cette évolution de nos modes de travail peut être à l’origine d’une recherche d’optimisation permanente de son temps génératrice de stress au travail.
Selon une étude conduite de janvier 2020 à mars 2021 pour Dynamic Workplace et Speak & Act en partenariat avec Herman Miller, la Région Ile-de-France, l’Hôpital Européen de Paris et l’INSEEC MSc & MBA et Bachelor, 60% des salariés se considéraient comme stressés à cette période, un stress en grande partie lié à la charge mentale générée par l’évolution de notre organisation du travail. Ainsi, de plus en plus de salariés déclarent travailler le week-end (73% contre 60% avant la crise), penser au travail (61% contre 46%) ou lire des mails professionnels (49% contre 19%) avant d’aller dormir. 46% des collaborateurs attestent que les situations et mails « urgents » se sont multipliés par rapport à l’avant crise.
Si ce test à grande échelle est une première outre-Manche, plusieurs voisins européens ont déjà été séduits par l’expérience. A l’image de l’Espagne, qui a ouvert la porte à la semaine de quatre jours au début de l’année pour un test avec 200 entreprises de tailles différentes en réduisant la durée du travail sans réduction de salaire ; ou de l’Islande, qui a mené, de 2015 à 2019, un programme similaire à celui du Royaume-Uni.
En Belgique, la réforme du marché du travail baptisée « le deal pour l’emploi » a été annoncée le 07 octobre 2022. Ainsi, les Belges pourront bel et bien choisir leur temps de travail, le nombre de jours travaillés dans la semaine, quatre ou cinq. Le nombre d’heures hebdomadaires reste le même : 38 heures par semaine. Les employés du privé et les agents de la fonction publique qui opteront pour la semaine de quatre jours devront donc faire des journées à rallonge : 9h30 par jour pour libérer le cinquième jour.
Plusieurs universités, dont Oxford, Cambridge et Boston College aux Etats-Unis, travailleront en collaboration avec les think tank Autonomy et 4 Day Week Global, qui considèrent la semaine de quatre jours comme une évolution inévitable. Selon eux, ce modèle deviendrait la norme, de plus en plus de cadres et de managers se concentrant désormais sur la qualité des résultats, et non sur la quantité d’heures.
Ces impacts peuvent aussi être réduits en pensant la modularité des espaces et en optant pour des mécaniques de partage inter-entreprises et/ou de diversification d’activités. A titre d’exemple, nous pouvons citer le Garage à Lille qui a ouvert un premier espace partagé hybride en février 2022 et vise l’ouverture d’une dizaine d’autres lieux à horizon 2030.
Enfin, une tendance émergente en matière d’espaces de travail est celle de la décentralisation en recourant à des espaces de coworking en région, facilitant ainsi l’implantation de collaborateurs sur des territoires plus éloignés du siège social des entreprises.
L’organisation du travail fait l’objet de profonds questionnements, tant en termes de rapport au temps qu’en termes d’espaces physiques occupés par les organisations et les personnes qui les font vivre au quotidien. Chez Arthur Hunt, nous accompagnons nos clients dans les réflexions stratégiques préalables à leurs transformations en intégrant ces thématiques et avons à cœur de mobiliser les collectifs pour coconstruire le monde du travail de demain en phase avec les multiples enjeux qui s’imposent aux organisations.